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17 octobre 2017

Dans l'automne flamboyant

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La caissière est accablée ainsi que le pompiste la vendeuse la guichetière le manœuvre de l’industrie et du bâtiment le garçon de café le directeur la secrétaire le représentant tous accablés l’employé administratif le laveur de vitres tous ils vivent des journées grises dans l’automne flamboyant

 

La caissière vit des journées grises dans l’automne flamboyant

 

Tu n’y peux rien qu’une grande partie de la population laborieuse de l’hémisphère nord déprime au travail et passe à côté de l’automne flamboyant

 

Toi tu ne peux rien pour la caissière tu as écrit un poème tu pourrais lui en faire cadeau elle ne saurait pas quoi dire ni faire tu la gênerais dans l’accablement de sa journée la tête des autres clients encore un de ces dragueurs

 

Tu as écrit un poème cette nuit peut-être n’a-t-il aucune valeur peut-être n’est-ce même pas un poème ou alors juste un fragment de poème un éclat

 

Tu as tiré cet éclat de poème de la mine de la vie sociale du début du 21ème siècle

 

Cet éclat brut de poème est devenu un poème entier parce qu’il t’a subitement relié à l’automne flamboyant même s’il ne parle pas directement de la splendeur de cette journée grise pour la caissière flamboyante pour toi

 

Tu as écrit ce poème sans nécessité commerciale aucun éditeur ne te l’a commandé

 

Il s’agit donc d’un acte absurde dans le contexte socio-économique de ce début de 21ème siècle en pleine gueule de bois européenne en plein milieu d’une petite ville industrielle française des massifs boisés du Bugey dont la devise est « Improbo fabrum labore ascendit » *

 

Tu as écrit ce poème comme a crié l’effraie que tu entends le soir lorsque tu fumes un cigare sur le pas de ta porte face à la forêt toute proche

 

Tu as écrit comme a piaulé la buse variable qui plane au-dessus de la clairière

 

Tu planes disent-ils tu planes pensent tes amis vous planez pourrait te rétorquer la caissière qui vit des journées grises dans l’automne flamboyant et qui aurait plus besoin d’un jour de congé que d’un poème le pauvre voilà ce qu’il a fait de sa journée un poème il plane le pauvre si c’est pas malheureux à 46 ans

 

Oui tu planes parce qu’un poème de rien du tout suffit à te relier à l’automne flamboyant oui tu planes ton regard plane parce que tu as conduit l’auto de bon matin sur le chemin départemental qui grimpe à flanc de montagne jusqu’à la crête

 

Tu as garé l’auto près de la souche du sapin pectiné géant (225 ans plus de 4 mètres de tour plus de 40 mètres de haut couché par la tempête du 27 décembre 1999) tu as continué à pied sur la crête jusqu’au point de vue d’où ton regard plane

 

Depuis la crête tu planes tu vois

 

Tu vois tout en même temps depuis la crête tu vois la ville loin la caissière aux journées grises dans l’automne flamboyant ton poème écrit cette nuit même en écoutant le Divertimento on « Sellinger’s round » de Sir Michael Tippett, la Sinfonietta de Benjamin Britten et le cri de l’effraie

 

D’ici tu vois tout et tu entends tout en même temps planer et piauler la buse variable

 

Tu vois tu entends tu sens tout de l’automne flamboyant qui lui aussi te guette t’écoute te flaire car il le peut grâce à la forêt par l’intermédiaire d’un pic d’un sanglier d’un chevreuil d’un passereau gros comme une noix

 

* « Elle s’est élevée grâce au travail opiniâtre de ses habitants »

Extrait de mon recueil de poèmes narratifs Estime-toi heureux, © Éditions Orage-Lagune-Express. Droits réservés.

Photo : ce mardi 17 octobre au couchant, vu de mon pré, derrière la maison.

 

Carnet / Feuilles et pages aux quatre vents

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Riche week-end de promenade dans la campagne lumineuse en compagnie des amis et la musique en prime avec deux concerts, le pianiste Alexander Paley vendredi et le claveciniste Olivier Leguay samedi. Beethoven, Tchaïkovski, Liszt, Rachmaninoff et Froberger le lendemain !

Je ne pensais pas connaître Alexander Paley avant son concert d’avril dernier et son nom tournait quand même un peu, assez étrangement, dans un recoin de ma mémoire.

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Le mystère s’est dissipé lorsque j’ai retrouvé un enregistrement de 2002 dans ma discothèque, le concerto pour piano et orchestre de la compositrice américaine Sheila Silver (née en 1946) suivi de ses six préludes pour piano d’après des poèmes de Charles Baudelaire (CD Naxos). Le concerto date de 1996 et les préludes de 1991. Dans la nuit, j’ai longuement réécouté l’interprétation d’Alexander Paley, ce qui m’a permis de renouer avec ces deux œuvres dans lesquelles je n’étais pas vraiment entré à l’époque déjà lointaine où j’avais acquis le disque.

Lundi, petit déjeuner dehors, certes peu matinal mais dehors (!) sous les frênes qui laissent leurs feuilles au vent. Quelques papillons entrent dans la danse et tout miroite dans la brise aux parfums d’humus et de roses tardives. De telles journées d’arrière-saison consolent des mois de grisaille.

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Des gens me cherchent parfois querelle à propos de mes deux derniers livres. Ils ignorent à quel point, depuis des années, j’ai pris de la distance par rapport à mon activité d’écriture. J’écris désormais mes livres comme le pommier fait des pommes, comme le frêne abandonne ses feuilles aux quatre vents.

 

13 octobre 2017

Concert / Les suites de Froberger par Olivier Leguay (clavecin) à Oyonnax

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Samedi 14 octobre à 20h30 dans l’atelier de l’artiste plasticien Jacki Maréchal, 3 rue Brunet à Oyonnax, Olivier Leguay donnera un concert de clavecin (entrée libre). Au programme les suites 19 à 24 de Jacob Froberger. Les portes seront fermées à partir de 20h45.